【JASMINE HEATHER O'HARA】Honesty, and Integrity.

« Sois honnête, et tu pourras gagner. » Gagner. Ce mot, ce terme. Combien de fois Jasmine Heather O'Hara avait bien pu l'entendre ? Elle ne saurait pas le dire, pas exactement. Elle avait toujours vécu avec ce même esprit de compétition ; cette peur de décevoir ses parents. Elle ne l'avait jamais dit. Pas à proprement parler. Même si les nombreux psychiatres qu'elle a bien pu voir tout au long de sa vie ne l'ont jamais vraiment aidés à prendre confiance en elle.
 Laissez-moi vous conter son histoire.



 Jasmine est née à Zootopia durant les périodes chaudes de l'été, le 16 juillet 1990. Sa mère, Shelly, était psychiatre, et son père, Walter, était médecin. A sa naissance, un problème fut relevé : Jasmine était bien plus petite que les prédateurs normaux, née un peu prématurément. Le médecin, formel, ne croyait alors que très peu en sa survie. A cet instant, le bonheur des parents s'écroula, tel un vulgaire château de carte. Leur enfant fut alors emmenée pendant presque 2 mois à l'hôpital, mise en couveuse pour être sûrs qu'elle ne garderait aucune séquelles qui mettraient sa vie en danger.
 Durant tous ce temps, les parents de la féline tentaient de passer aussi souvent qu'ils le pouvaient, même si son père ne pouvait vraiment à cause de son travail. Il travaillait dans un autre hôpital, et il ne pouvait, de toute façon pas exercer.
 Finalement, le verdict tomba :
 Jasmine resterait petite et garderait certainement quelques séquelles, mais rien de grave. Sa vie n'était pas en danger. Il faudrait simplement la surveiller, et rester attentif à sa santé.
 Shelly et Walter, fous de joie, purent enfin amener leur petite Jasmine Heather à la maison. Jasmine rendait hommage à la fleur de Jasmin, symbole de l'affection, tandis qu'Heather était un nom que les deux parents avaient beaucoup apprécié.
 ─ Notre petite puce fera de grandes choses.
 ─ Ce sont les plus petites personnes qui ont un grand cœur, souffla tendrement Shelly, admirant son enfant dans le berceau.
 Dans un sourire, Walter et Shelly frottèrent leur tête l'une contre l'autre, admirant leur fille totalement endormie. Elle était belle. Adorable. Son pelage était d'un gris pâle, avec des tons blancs et des reflets un peu plus grisés. Ses tâches, plus foncées, et suivant des tons anthracite, presque noirs, marquaient son corps, bien que sur son visage, elle prenaient la forme de griffures. Sous ses yeux, deux grandes lignes noires prenant des formes de larmes. Le pourtour de ses yeux, bien visibles, soulignés d'un grand trait noir, semblait former une sorte de masque.
 Un grain de beauté soulignait sa joue, près de ses babines.
 Ses canines, tranchantes, démontraient déjà la force de sa mâchoire, et lorsqu'elle bâillait, l'on pouvait voir sa petite langue rose ressortir.
 Ses iris, eux, étaient d'un violet pâle très pâle, contrastant avec ses pupilles, rappelant la couleur de la lavande et de l'hiver. Un dégradé de couleur plus pâle embellissait ses iris particulières. Le poil ras pour supporter la chaleur, les pattes pourvues de coussinets roses et tâchés. Son museau, tout aussi pâle, était aussi décoré de tâches noires. Son museau était orné d'un dégradé de couleur plus sombre.
 Un semblant de crinière sur le crâne se formait, plus blanche encore, longeant son dos, et le sommet de celui-ci, arrangée de manière particulière. Un marquage plus particulier, comme des tâches de naissance, étaient visible au niveau du haut de ses cuisses, et son épaule, assez près de ses clavicules.  
 Sa queue, assez longue, était décorée de rayures, le bout de son « plumeau » étant aussi noir que les marquage sous ses yeux, alors que des touffes de poils blanches décoraient ses oreilles. Par ailleurs, un dégradé particulier recouvrait le dessus de celles-ci. A cause d'un problème de rétractation des griffes, elle restait incapable de les rétracter, et celle-ci serait obligé de les garder sorties toute sa vie.
 Les médecins pensaient qu'elle ne mesurerait qu'1m60, tout au plus 1m65, si ce n'est moins.
 Malgré tout, elle semblait promise à une vie heureuse...

 « They fight me, vigorous and angry, watch them pounce
Ignite me, licking up the flames they bring about »

Ses parents étaient aimants ; aimants, mais exigeants. Shelly, bien que plus compréhensive, avait déjà décidé de l'avenir professionnel de sa fille : Elle devrait travailler dans la médecine, où pour la justice.
 C'est pourquoi depuis qu'elle était petite, Walter et elle tentaient de pousser Jasmine – qu'ils appelaient Heat affectueusement – sur le chemin de la réussite sur lesquels ils estimaient avoir progressé jadis.
 Heather était une enfant pleine de vie. Elle jouait, elle riait, grimpait aux arbres, prenait du bon temps. Ce matin-là, il était au moins 10h, avant que Heather ne se réveille dans sa chambre. Sa chambre était la plus grande de la maisonnée. Son lit, simplement fais en bois beige, était décoré d'un grand drap rose. A côté, contre le mur, se dressait un grand bureau avec beaucoup de dessins et même un ordinateur portable, pour pouvoir travailler un peu et discuter avec des amies.
 Devant son lit, il y avait une grande armoire en bois massif, beaucoup plus sombre. Au dessus, il y avait diverses peluches à l'effigie de ses Disneys et chanteurs favoris. Elle écoutait beaucoup de rock, voire de l'électro ou du pop-rock. Elle touchait un peu à tout. Ses groupes favoris ? Panic! At the Disco, Muse, Nightwish, Royal Republic... Twenty One Pilots ! Du Metallica aussi. Pour son âge, elle n'était pas très féminine.
 Récemment, elle avait même découvert les anime, mangas en tout genre, et l'univers des séries. Elle se définissait comme une otaku confirmée, possédant une immense bibliothèque de mangas, de romans, de CDs, de figurines, et de tout ce qui touchait à ses diverses passions. Précoce, elle savait déjà ce qu'elle voulait faire dans la vie.
 Elle voulait devenir chanteuse, et fonder un groupe avec ses meilleures amies, Leslie Winker et Rosa Hooks. Une petite panthère blonde aux yeux roses ainsi qu'une petite biche brune aux prunelles vertes.
 Heather avait tendance à se sentir mieux en tant que garçon. Alors elle s'habillait comme tel, portant des chemisettes, des jeans, mais jamais de jupe où autre. Il fallait dire qu'elle ne se pomponnait pas au grand dam de son père et sa mère, mais ils pensaient que cela était passager, car elle s'approchait dangereusement de la crise d'adolescence...

 La jeune panthère bondit sur ses pattes après avoir enfilé sa chemisette à carreaux et son jeans. Habillée confortablement, celle-ci poussa un soupir de bien-être devant le miroir. Ses babines s'étirèrent dans un rictus forcé (et plutôt amusant de loin en fait) vérifiant si elle n'avait rien entre les crocs ; elle ne s'était pas encore brossé les dents et elle n'avait rien dans l'estomac. Et justement, celui-ci criait déjà famine. Elle souffrait de soucis avec sa thyroïde, de l'hypothyroïdie justement.
 En gros, son cerveau captait mal les signaux et s'imaginait avoir toujours faim. C'était donc dur pour elle de combler son appétit ; mais ses parents l'avaient habituée depuis petite à manger peu. Mais ce n'est pas pour autant qu'elle accepterait de savourer ses céréales préférées au matin ! De bonne humeur, elle bondit hors de sa chambre aux revêtements bleus ; là ou il y avait son nom d'inscrit en grandes lettres qui rappelaient la typographie d'Alice au pays des Merveilles.
 Elle descendit ses escaliers à la va-vite, sautant de quatre en quatre, les oreilles dressées alors que sa frimousse était égayée d'un large sourire. A cause de sa démarche imposante et le bruit qu'elle faisait, ses parents l'avaient vu arriver de loin.
 ─ Olah minute papillon, que fais-tu en étant aussi agitée ? demanda son père en reposant sa tasse de café encore brûlante sur la table décorée d'une simple nappe à carreaux au plis abîmés par le temps et légèrement brûlés par des cendres de cigarettes que son père fumait parfois pour déstresser.
 Heather se stoppa juste devant ses parents, époussetant sa chemise de ses coussinets tâchés, un grand sourire aux babines :
─ J'ai faim ! Je voulais profiter des courses d'hier soir. Alors ? Est-ce que vous allez assister à la pièce de ce soir ?
─ Eh bien, ce sera ta mère qui t'accompagnera ! Je suis de service ce soir, je n'ai pas réussi à échanger mon poste avec un collègue...
Heather afficha brièvement une moue déçue, alors que son père se redressait sur ses pattes, étirant son veston plissé vers le bas. Il vint caresser la tête de sa gamine :
 ─ Ce n'est pas grave, maman filmera.
 ─ Oui ! Et il verra à quel point tu as été géniale ma puce, assura la féline, tout en souriant. Heather finit par sourire d'un air malicieux, tentant de se libérer de l'emprise de son père, un sourire taquin aux babines :
 ─ Ouais, alors. Je vais déjeuner, c'est pas grave !
 Tout en allant se faire son chocolat chaud, elle cacha sa déception. Bien-sûr qu'elle était déçue. Mais elle ne se pensait pas en droit de se plaindre. Elle fixa un moment le lait couler dans sa tasse préférée. Elle évitait en général de se plaindre, même s'il lui arrivait de bouder aussi. Là, elle savait que son père avait au moins essayé. Mais c'était aussi qu'à chaque fois qu'elle se donnait en spectacle, elle n'avait pas eu l'honneur de voir son paternel l'admirer dans son rôle.
 Elle jouait le rôle d'Aliocha, dans Aliocha, d'Henri Troyat, cet ouvrage l'avait fait beaucoup pleurer. Elle jouait le rôle d'un garçon. Mais ce n'était pas grave, elle trouvait ça rigolo, même si ses parents avaient un peu pesté. Heureusement ce ne serait pas la seule à jouer ce rôle, sinon ses parents auraient refusé de la laisser jouer. Ce qui la faisait vibrer dans cette relation, c'était les deux personnages qui entretenaient une amitié sincère.
Cette relation ; pure et fraternelle, entre deux hommes de l'époque. Heather, qui adorait lire, avait saisi même jeune le magnifique et émouvant message véhiculé par l'auteur sur l'importance d'une amitié, dès le plus jeune âge...
 En réfléchissant, éclairée par la lumière qui traversait de part en part le rideau orange vif à motifs floraux, la tasse se brisa sous ses pattes. C'était une force qu'elle ne maîtrisait pas. Une force qui grandissait. Elle gémit de douleur en fermant l’œil, sentant le sang couler de ses coussinets.
 Elle se rinça les pattes, allant chercher du désinfectant, qui se trouvait juste derrière, dans une petite boîte de secours. Elle s’assit alors sur la chaise en paille, se tenant au bord de la table pour tamponner d'un chiffon humide la blessure, à l'aide du désinfectant, et appliqua un pansement. Elle ferma les yeux. C'était douloureux.
 Heather observa un moment ses pieds. Elle avait un mauvais pressentiment qui lui serrait le cœur.
 Je dois me faire des idées, se dit-t-elle alors.
 Finalement, elle savoura son goûter, attendant avec impatience mais crainte le soir-même. Elle avait peur de ne pas voir sa mère répondre présente. Elle jouerait peut-être un peu de piano, cela lui ferait du bien.
 Au final, la soirée se passa très bien, et Heather remplit son rôle à merveille. Elle se sentait renaître sous les projecteurs, elle avait la sensation d'être... finalement soi-même.
 Son costume avait été cousu main ; et elle ne regrettait pas le trac tout ressenti. En revenant dans les coulisses après avoir fait ses salutations au public ; elle rejoignit finalement ses deux meilleures amies, qui ne lui avaient pas parlé de la soirée. Heather ne s'en était pas inquiétée.
 Après tout Heather voulait devenir chanteuse, bosser dans le domaine de l'art. Et ses copines étaient de la partie ! Tout sourire, et retirant son béret, elle marcha d'une démarche assurée vers ses deux meilleures amies :
─ Les filles, vous étiez superbes !
 Aucune ne répondirent. Elles avaient le regard fuyant. Le sourire d'Heather disparut aussitôt.
 ─ Qu'est-ce qui ne va pas ?
 Rosa, qui était la plus franchouillarde des deux retira son veston, portant une robe bleue ciel à rayure avec des froufrous blanc. C'était l'une des rares de la troupe d'Alario à jouer un rôle féminin dans la pièce de ce soir. Elle posa ses deux prunelles roses dans celles de la petite féline blanche. Son regard était austère, et non sans gravité, elle parla, prenant les pattes d'Heather dans les siennes :
─ Écoute Heather. Ce n'est pas que nous ne t'aimons pas, nous t'aimons toutes les deux.
 La petite biche approuva les propos de son amie, l'air plus timide.
 ─ Oui. Nous t'aimons, mais nous ne pouvons plus être copines. Comme tu le sais, nous allons déménager toutes les deux, alors nous ne reverrons plus.
 ─ Mais... commença Heather, sous le choc.
 ─ Nous ne pouvons plus traîner avec toi. Si nous voulons nous faire accepter dans le groupe des plus populaires, alors nous devons faire ce choix. Nous ne pouvons pas accepter les brimades des autres en cours, continua l'autre léoparde. Heather avait les yeux écarquillés. C'était stupide.
 D'abord perclus par la peur, elle finit par s'enfuir en sentant les larmes lui monter aux yeux. Elle se sentait transpercée de part en part. Rosa voulut la rattraper, mais Leslie l'en empêcha.
 ─ Heather, attends !
 ─Laisse-là Rosa. Cela devait arriver...
 « Ce fut à ce moment là que j'ai tout perdu... »

I paced around for hours on empty
I jumped at the slightest of sounds

 Heather, qui courait aussi vite qui le pouvait sentait et entendait le sol craquer sous ses pattes puissantes. Elle pleurait. Elle sentait les larmes couler, alors que sa gorge la brûlait. Elle voulait crier. Le goût amer de la trahison. Le goût de la déception, qui tapissait sa langue. Ah, oui... elle avait eu tort de penser que tout se finirait bien.
 Elle écartait les rideaux de la force de ses griffes alors qu'elle sortait par derrière, grâce à la sortie de secours. Elle voulait plus rien voir, ni rien entendre. Sa mère, qui l'avait vue, s'était élancée à sa poursuite.
 ─ Ma puce ?! Qu'est-ce qu'il y a ?! Dis-le moi !
 Finalement, elle s'était retrouvée à la maison à pleurer dans les bras réconfortants de sa maman. Ce fut l'un des facteurs qui la poussa à se sentir plus homme que femme.
Après être rentrée et avoir résumé brièvement la situation, encore sous le choc, elle restait là, contre sa poitrine, allongée à moitié sur le lit. Finalement, morte de fatigue, elle avait fini par s'endormir.

 Le père de Heather était rentré tardivement. Il était énervé. Il puait la colère à plein nez. Et pour cause, il venait de se faire licencier. L'on était dans un monde où les plus vieux se faisaient virer à cause de leur âge. Et pourtant il n'avait que la quarantaine, mais visiblement, ils préféraient les plus jeunes. En ayant appris l'histoire, un verre d'alcool à la patte, il s'était énervé :
─ Tout ça, c'est de la faute de la gamine ! Si elle n'avait pas été amie avec ces sales pestes et ne s'était pas mise en tête de devenir chanteuse, et qu'elle avait gardé les pieds sur terre, jamais elle aurait raté la remise des prix !
─ Walter, ne te méprends pas, tu t'énerves parce tu as été viré, un point c'est tout. Heather n'y peut rien et tu le sais.
  ─ Je m'en fiche. Elle sera forcée de suivre les bras de mon père, mais pas autrement. J'ai mieux à faire que de gérer les délires d'une gamine adolescente. Elle sera bien mieux avec un travaille qui paie bien et qui consiste à aider l'humanité, et pas en chantant dans des bars miteux. Il faut qu'elle grandisse. Et puis, il y à notre divorce aussi. Cela va la durcir, tu verras.
 ─ Walter...
 Le félin gronda, reposant froidement le verre sur la table, produisant un bruit de casse. Heather, réveillée à cause du bruit et des éclats de voix, se redressa en fronçant son petit museau rose, frissonnant. Son poil se hérissa, se redressant d'un bond. Elle était claustrophobe. Elle avait peur des endroits clos. Et du noir. Forçant sur son dos déjà déformé, elle poussa un cri, se cognant contre le lit. Elle alerta alors Shelly, qui remonta pour la calmer. La féline alluma la lumière, accourant vers Heather qui pleurait à nouveau. Elle avait un genoux à terre :
 ─ Ma petite boule de neige...
 Heather resserra ses griffes sur le haut de sa mère. Elle serrait les dents, comme si elle tentait de ravaler péniblement ses sanglots, la queue basse et les oreilles couchées sur le côté :
 ─ J'ai entendu papa... Je sais que vous allez divorcer.
« Je ne veux pas... »

I paced around for hours on empty
I jumped at the slightest of sounds

Au lycée, bien plus tard
 Cette période là ne fut pas plus intéressante que le collège. Ce fut juste pour elle une période où elle alternait entre les visites médicales, les cours, et ses cours de théâtre. Elle avait une santé fragile (problèmes cardiaques et de dos), et ses parents avaient attendus qu'elle s'en remette avant de remettre l'idée du divorce sur le tapis. Ce fut plus particulièrement à cette période de sa vie qu'elle assuma être genderfluid, et qu'elle se mit à s'habiller comme un homme, mais en l'assumant totalement.
 Se définissant comme asexuelle, elle repoussa les avances de quelques amis de son groupe qui pensaient que cela pourrait aller plus loin. En thérapie, Heather apprit à s'affirmer et à devenir plus forte, à ne pas faire attention à ce que disaient les autres, et au final, elle avait fini, grâce à sa psychologue, par trouver de nouvelles passions, à se faire de nouveaux amis. Elle se sentait renaître, même si elle s'était noyée dans les médicaments, bien qu'elle tentait de faire une cure, toujours suivie malgré ses longues études.
Secrètement, elle chantait dans un bar sous un autre pseudonyme, et était serveuse, pour au moins payer son loyer et ses études. Comment s'appelait-t-elle dans ce bar en plein coeur de la ville ? ; Seylah. Celle-ci avait assez de succès, mais hors de question que sa famille et ses amis apprennent qu'elle travaille au Caravan Palace... Elle préférait encore qu'ils la taquinent sur le fait qu'elle se voie plus homme que femme, que la critiquer sur ses petits plaisirs personnels.
 Ils se feraient bien rares plus tard après tout.
Et puis, ses parents n'en sauraient rien. Elle ne les voyait que rarement, mais elle ne leur en voulait pas. Avec le temps, Heather avait appris à faire avec. Du moins, le pensait-t-elle encore... Heather était perturbée psychologiquement et avait des troubles bipolaires.
 Elle n'était plus sûre de rien. Ces nuits de terreurs. Ces hallucinations. Ces ombres. Ces croquis sanglants. Ces cicatrices.
Elle vivait avec. Mais elle n'était jamais à l'abris d'une rechute, jamais... Tiendrait-t-elle le coup même si elle avait tout pour être heureuse ? Elle espérait que oui.
Le bonheur est éphémère, n'est-ce pas ?


I'm bigger than my body
I'm colder than this home
I'm meaner than my demons
I'm bigger than these bones

 « Et puis, c'est juste temporaire, » disait-t-elle...
 Quelques années après, à la fac


Heather avait eu 21 ans. Ses parents avaient divorcés comme prévus. Ils ne pouvaient vivre à distance, même en s'aimant toujours. Ce concept d'amour à distance était dépassé pour eux. Sa mère exerçait toujours comme psychiatre, son père lui gérait un centre de pédiatrie à plusieurs heures d'ici. Alors elle habitait avec son grand père paternel, Wilde Spencer, un vieux lion sévère à la crinière de feu et aux yeux verts. C'était un homme très sévère, toujours habillé posément de chemises de style hawaïennes et vivant dans une petite maison blanche et rouge avec un jardin, juste en face du port.
 C'était un ancien policier à la retraite, mais très doué dans son domaine. Il avait depuis toujours entraîné Heather à développer sa mémoire quasi-diététique, à l'entraîner comme profileur et la baignant dans le monde de la police, et il lui avait même appris à tirer, même si elle évitait à cause de son dos qui gérait un peu mal les parcours. Mais quand il s'agissait de deviner, et mentir, elle savait faire ; elle savait même comment détourner un détecteur de mensonges et avait approfondi ses connaissances en psychologie. Sa voix était déjà toute tracée : elle voulait devenir avocate, et son grand-père ne lui avait imposé qu'une seule condition : qu'elle bosse à mi-temps dans la police, comme consultante et pour aider quant au profilage. Avec ses connaissances en psychologie, cela pouvait être intéressant. Elle alternerait alors entre l'école de police, et la fac, pour poursuivre ses études de droit.
 Malgré ses troubles bipolaires et sa santé fragile, elle s'était adaptée au rythme et tenait le coup. Du moins, pour le moment.
 Elle avait toujours été passionnée par les droits. Dans les films, Heather avait toujours admiré le justicier. Celui qui faisait régner le bien.
 Une après-midi où elle n'avait pas cours ; en période de vacances, son grand-père lui avait souri :
 ─ Heather. Tu seras bientôt diplômée et titularisée, non ?
 ─ Bientôt, oui, pourquoi ?
 ─ Le jour où tu graviras ces marches du tribunal, je serais là pour te voir. Je suis fier de toi. Tu es un type bien.
 ─ Je suis fier aussi.
 Elle sourit. C'était une promesse.
 
And I've grown familiar
With villains that live in my head
They beg me to write them
So I'll never die when I'm dead

 Finalement, le temps passa encore plus vite que prévu, et Heather fut enfin titularisée. Elle avait déménagé à Savanna Central, depuis le temps, endroit quelque peu éloigné de chez son grand-père, qui préférait la campagne.
 Ce fut une après-midi d'avril, au tribunal. Heather était l'avocate d'un riche client accusé de meurtre. Le silence était lourd dans l'assemblée. Les portes s'ouvrirent.
 Un léopard la carrure et aux épaules droites fit son apparition. Des lunettes sur le museau, et vêtu tel un homme en costard gris, celui-ci passait entre les rangs, un air fier au visage, alors que le grand-père d'Heather se tenait dans le fond, souriant fièrement. Une fois près des marches, elle inspira un coup, et gravit alors cet ultime obstacle entre elle et le juge, avant de poser sa patte sur la sorte de pupitre en bois. Et non sans fierté ; la voix lourde de sentiments, elle déclara alors, le torse bombé, son insigne brillant fièrement à sa poitrine :
 ─ Je suis prête, monsieur le juge.
 ─ Bien, le procès peut commencer. Faites entrer l'accusé.
 Le bruit des portes sonna le début du procès.
 Elle croisa le regard de son grand-père. Elle avait réussi son rêve. Et sa nouvelle vie venait tout juste de commencer...
 
 
 

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